Chimioprévention du paludisme pérenne chez les moins de 5 ans : le Kongo Central en première ligne

Chimioprévention du paludisme pérenne chez les moins de 5 ans : le Kongo Central en première ligne

Chimioprévention du paludisme pérenne chez les moins de 5 ans : le Kongo Central en première ligne

Chimioprévention du paludisme pérenne chez les moins de 5 ans : le Kongo Central en première ligne

En novembre 2023, une initiative révolutionnaire a été lancée par les autorités sanitaires de la République démocratique du Congo (RDC) dans huit zones de santé du Kongo Central, dont quatre zones pilotes d’intervention – Boko Kivulu, Kisantu, Mbanza-Ngungu et Kwilu Ngongo – visant à fournir une chimioprévention du paludisme pérenne (CPP) aux enfants âgés de 10 semaines à 23 mois, dans le but de lutter contre l’impact dévastateur du paludisme et réduire les inégalités d’accès aux services de santé pour les enfants de cette province du sud-ouest du pays.

La CPP consiste à administrer 6 doses de la Sulfadoxine-pyriméthamine (SP) aux enfants de 10 semaines, 14 semaines, 6 mois, 9 mois, 12 mois et 15 mois, conjointement avec les vaccins du programme élargi de vaccination (PEV), ou l’administration de routine de la vitamine A lors de la consultation préscolaire (CPS).

Pour déployer largement les médicaments antipaludiques dans les zones de santé pilotes, les autorités sanitaires ont, selon les directives de l’OMS, fourni la SP aux établissements de santé de ces zones pilotes visant à atteindre le plus d’enfants de moins de 24 mois en 2024.

« En tant qu’infirmière titulaire, je dois dire que j’apprécie beaucoup le bien-fondé de l’introduction de la chimioprévention du paludisme pérenne chez les enfants éligibles arrivant dans notre centre de santé, car cette intervention s’est révélée comme l’une des plus protectrices et plus efficaces possibles », a déclaré Matondo Lutekayindulanga, qui gère le centre de santé d’Etat de Loma, à Mbanza-Ngungu. 

« En comparant les données de décembre 2023 avec celles de janvier et de février 2024, nous avons vite remarqué une nette réduction de la morbidité et de la mortalité liées au paludisme chez les enfants de moins de 5 ans éligibles à l’administration de la CPP », a-t-elle précisé, se basant sur le dossier de chaque enfant enregistré dans son centre depuis la mise en œuvre de ce programme dans les zones pilotes.

Grâce à l’important soutien de l’OMS, PATH, USAID, SANRU et des autres partenaires, l’infirmière Matondo a suivi en novembre 2023, avec plus de 78 autres personnels de santé, la formation sur l’introduction de la CPP. Elle en a aussi appris davantage sur la façon de prendre en charge les enfants éligibles à cette chimioprévention, et de la manière de faire des rapports détaillés à ce sujet.

Les personnels médicaux des différentes zones de santé pilotes choisies pour la CPP lors d’une séance de travail avec les différents partenaires venus dans la province pour la supervision des activités. OMS/Eugene Kabambi

Pour relever les défis qui pouvaient être posés par la réticence dans les communautés à la l’introduction de la CPP, Matondo loue le travail de sensibilisation réalisé par les équipes des comités de santé (CODESA) et des relais communautaires locaux qui ont pu partager des informations utiles avec les parents et les soignants sur les avantages de la Sulfadoxine­-pyriméthamine. « Il n’y a pas eu de problème de résistance communautaire liée à la CPP. L’information a été communiquée par les CODESA, expliquant aux familles, essentiellement aux mamans comment elles allaient désormais trouver dans les centres de santé, un médicament pour renforcer la prévention contre le paludisme », a-t-elle dit, ajoutant qu’il y avait une synergie plus forte dans l’adhésion de la communauté à la CPP.

Au cœur du projet se trouve l’objectif de protéger efficacement les nourrissons et les enfants qui sont très vulnérables à la transmission du paludisme, du fait qu’ils n’ont pas encore développé l’immunité protectrice contre le parasite de cette maladie, afin de leur éviter le risque élevé d’hospitalisation et de mortalité au cours de deux premières années de leur vie.

Pour l’instant, alors que la mise en œuvre de la CPP gagne progressivement du terrain, des jeunes mamans comme Mantweli Nzau, reconnaissent la valeur ajoutée de ce médicament nouvellement introduit. « Mon premier enfant qui a actuellement plus de deux ans n’avait pas bénéficié de la CPP, mais Fastina, mon deuxième garçon qui vient tout juste d’avoir ses 10 semaines, est le tout premier à recevoir ce médicament antipaludique. Le personnel médical du centre de santé de Loma m’a expliqué les avantages de la SP. Je me sens vraiment rassurée », a raconté la jeune femme de 26 ans.

« Ce que nous faisons ici, c’est de créer un sentiment de confiance dans les communautés et les familles sur la base de besoins réels de protéger les tout petits du paludisme », a déclaré Matondo, forte de ses onze années de carrière dans ce centre de santé dont la majorité du personnel soignant et administratif est féminine (30 femmes et quatre hommes). « Ce n’est pas une imposition à la mode, mais cela est généré par les réalités du terrain », a-t-elle ajouté, en souriant.

 En raison de l’augmentation de l’intérêt croissant depuis le lancement de la CPP, « il était nécessaire que nous venions sur le terrain, ensemble avec l’OMS, PATH et les autres partenaires, pour évaluer et superviser conjointement les activités et la capacité des acteurs sur le terrain sur la mise en œuvre de la CPP au cours du premier trimestre de l’année 2024, et voir aussi comment améliorer les choses sur la base des leçons apprises », a expliqué la Dre Nana Mangaba, cheffe de division en charge de la prévention multiple au Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP). 

Le Dr Patrick Bahizi, point focal paludisme de l’OMS, assiste à une séance de la CPP pendant l’administration de la Sulfadoxine­pyriméthamine à un bébé, dans la zone de santé de Mbanza-Ngungu. OMS/Eugene Kabambi

Les données les plus récentes issues du système de surveillance épidémiologique du Ministère de la Santé Publique, Hygiène et Prévention et du rapport annuel du PLNP de 2022 montrent que les enfants de moins de 5 ans représentent pratiquement 50% des cas de paludisme et plus ou moins 70% des décès dus à cette endémie en RDC. Selon ces données, la RDC a enregistré 27 296 419 cas de paludisme dont 13 300 804 chez les enfants âgés de moins de 5 ans (48,7%), dont 11 766 48 cas de paludisme grave, incluant 24 880 décès dus au paludisme, parmi lesquels 16 921 chez les enfants de moins de cinq ans (68%). 

« Ces sombres données soulignent la nécessité pour le gouvernement de la RDC et ses partenaires de travailler ensemble et d’intensifier la lutte contre le paludisme à travers le programme de l’introduction de la chimioprévention pérenne du paludisme, et très prochainement, du vaccin antipaludique, afin d’améliorer la santé des enfants de moins de 5 ans, en particulier dans un contexte de défis sanitaires complexes et émergents que connaît la RDC », a déclaré le Dr Boureima Hama Sambo, Représentant de l’OMS. 

C’est pourquoi, « il était très vital pour nous de venir sur le terrain pour évaluer le niveau d’intégration de la CPP dans ces zones de santé, examiner de près la gestion des intrants et la manière dont les activités de la communication et de l’engagement communautaire sont menées, ainsi que la qualité des données collectées auprès des établissements des soins de santé », a souligné Mangaba.

 « Les autorités de santé publique encouragent ces approches pertinentes qui permettent aux communautés et aux parents ayant des enfants de 10 semaines à 23 mois de commencer la CPP, et nous pensons que cette initiative sera à la fois efficace et un espace pour partager les expériences », a indiqué le Dr Patrick Bahizi, point focal de paludisme au Bureau de Pays de l’OMS en RDC. 

A la fin du mois de février 2024, le programme de la chimioprévention du paludisme pérenne dans les quatre zones de santé pilotes avait atteint un total de 7 963 enfants éligibles depuis décembre 2023 (CPP1, CPP2 et CPP3). Le succès de cette initiative a renforcé l’engagement des autorités sanitaires de la RDC à poursuivre leurs efforts pour son intégration graduelle dans les activités de routine, avant son extension dans d’autres zones de santé, ce qui aidera à « augmenter davantage l’immunité protectrice des enfants », contribuant ainsi à ce qu’ils grandissent en meilleure santé.

Distribué par APO Group pour World Health Organization (WHO) – Democratic Republic of Congo.